Date : samedi 12 juin 2010 - Participants : 29 - Organisateurs : Béatrice CHOQUET-LOLL et André-Xavier HEINRICH, les deux enfants du pays -Au programme : 11 h 45: rendez-vous dans la cour de la Manufacture d'Impression sur Étoffes (MIE) – 15 h 00 : visite du magasin d'usine - 15 h 30 retour groupé vers le centre de la Cité, place de l'Hôtel-de-Ville – 16 h 15 : réception officielle à la Mairie avec vin d'honneur, suivie de la visite guidée du Musée – 17 h 30 : visite guidée du centre-ville historique, en direction de la Cave coopérative Martin ZAHN – 18 h 15 : réception à la Cave par MM. Yves et Raymond BALTENWECK (président et président-honoraire), rappel de l'historique de la Cave (la plus ancienne de France !) - visite guidée des imposantes installations, dégustations commentées, etc. – 19 h 15 : départ groupé en direction du restaurant "Au Relais des Ménétriers" - repas gastronomique dans une ambiance très conviviale.
Au cours du repas, le Dr Pierre HAAS, président de la section invitante, adressa tout d'abord ses cordiales félicitations et ses très sincères remerciements aux deux organisateurs de la rencontre, salua ensuite la présence à cette sortie du Dr Jürgen ESSLINGER, co-président de France-Allemagne-Vétérinaire, et ne manqua pas de présenter les excuses du Dr Freiherr Edgar VON CRAMM, président (empêché) de la section badoise de l'Amicale ; il transmettra enfin à l'ensemble des participants les encouragements et les confratemelles salutations du Dr André DESBOIS, président de France-Allemagne-Vétérinaire. Au cours d'une brève allocution, le Dr Urban BITZIGHOFER, de la section badoise, informa l'assemblée d'un projet de visite insolite quelque part en la bonne et belle ville de Fribourg-en-Brisgau, à l'occasion de la rencontre d'automne 2010.
Ribeauvillé en chiffres
Région Alsace - Département du Haut-Rhin - Chef-lieu d'arrondissement avec 4 cantons - Chef-lieu de canton avec 10 communes. Les habitants : Ribeauvilléens / Ratbaldovilléens (en français) Rappoltsweiler (en allemand) - Ràppschwihr (en alsacien). - Code postal = 68150 - Code RNSE = 68269 - Coordonnées = 48° 12' N, 7° 19' 0. - 5210 habitants (recensement 2009). - Densité de population = 153 habitants au km2. - Altitude = 188 à 992 m. Superfîcie totale = 3220 ha, 74 a, 13 ca comportant le domaine forestier et la surface agricole utile (SAU). Le domaine forestier comprend : 1023 ha de forêt communale (avec ¼ de feuillus et ¾ de résineux) et 1500 ha de forêt domaniale ; quant à la SAU, on lui reconnaît 321 ha de vignes AOC, 123 ha de terres labourables et 51 ha de surfaces enherbées. Le principal cours d'eau - le Strengbach, né à 950 m à proximité de la ferme Adelspach, entre Aubure et Sainte-Marie-aux-Mines - reçoit les ruisseaux du Lützelbach, du Muesbach, de l'Ibach et du Sylltal avant de se jeter dans la Fecht (affluent de l'Ill) au Sud de Guémar, après un trajet d'environ 25 km. Signalons que la Communauté de Communes de Ribeauvillé est un regroupement de 16 communes qui compte 18.879 habitants au 1er janvier 2010 ; son siège se trouve à Ribeauvillé, 1 rue Pierre de Coubertin. Elle tire son origine de la transformation du SIVOM de Ribeauvillé et environs créé le 06/06/1967 en communauté de communes, le 01/06/1996.
Aperçu historique de la Cité des Ribeaupierre et des Ménétriers
1) La Cité des Ribeaupierre
Les trouvailles archéologiques sont multiples et variées dans la capitale des Rappolstein (= Ribeau Pierre) et dans ses environs ; rien d'étonnant à cela, la Cité étant érigée à l'entrée d'une vallée - celle du Strengbach - mais encore à proximité de l'antique voie nord-sud longeant le piémont vosgien fertile et ensoleillé, le long de laquelle se sont implantées des dizaines de cités au Moyen-Âge. D'aucuns admettent aujourd'hui les premières dénominations - en 759, 768 et 777 - de Ratbldo vilare / Ratbeldovilare et de Ratpoldesvilare en 896. Rappoltsweiler (allemand), plus tard francisé en Ribeauvillé sur le modèle de Ribeaupierre (= Rappolstein), apparaît au XIIe siècle sous la forme de Ratpoltsvilare. Les anciens soulignent que la première dénomination de Ratba(o)lsvilare devait pouvoir signifier "le domaine rural de Ratbald ou Ratpold" qui aurait été à l'origine du village et qui serait devenu le berceau de Ribeauvillé. L'imposante masse granitique qui se détache de la montagne et portant le nom de Saint-Ulrich, est le plus grand des trois châteaux : il prendra le nom allemand de Rappolstein, c'est-à-dire "le rocher de Ratbald ou de Ratpold".
Le nom de Ribeauvillé est intimement lié à celui de la célèbre lignée des chevaliers de Ribeaupierre. Ribeauvillé, d'abord simple village devient bientôt le centre de la Seigneurie des Ribeaupierre, forte de ses six communes et qui s'étendait depuis la rive droite de la Lièpvrette dans la vallée de Sainte-Marie-aux-Mines (présence de minerai argenti et plombifere) sur toute la vallée arrière de Kaysersberg (= petite Seigneurie de Honack) jusqu'à la partie antérieure de la vallée de Munster. Mais ce seront en fait "des étrangers" qui donneront au nom de la lignée sa grande renommée. Un chevalier (originaire du Wurtemberg) venu dans les rangs de la petite noblesse rhénane et accom-pagnant Frédéric Barberousse - Egenolphe d'Urslingen - va véritablement fonder la lignée des Ribeau-pierre en prenant pour épouse la fille et héritière de la première famille qui portait ce nom (1056). C'est sans doute sous le mandat de ce preux chevalier que se construisirent les trois châteaux sur la montagne : Saint-Ulrich ou Grand Ribeaupierre (520 m), Girsberg ou der Stein (530 m) et Hohrappolstein / Haut Ribeaupierre / Altenkastel (Altum castellum) (640 m). Les Seigneurs de Ribeaupierre sont alors une des familles les plus puissantes d'Alsace, et leur cité, Ribeauvillé - ville formée par quatre villages contigus - sera entourée de remparts entre 1284 et 1287 ; elle obtient le statut de ville peu après 1290. Marchés et foire font du lieu une ville renommée avec un artisanat très développé.
À l'époque de la Guerre des Paysans (1525), un quatrième château (aujourd'hui lycée) est construit par la famille des Ribeaupierre dans la partie haute de la ville, à l'intérieur des remparts ; ce château, doté de plans d'eaux, de jardins en terrasses, etc., recevra la visite du roi Louis XIV en 1673 (à l'occasion d'un de ses déplacements vers la forteresse de Neuf-Brisach) et celle du roi de Pologne Stanislas Leczinski en 1725 (lors de son voyage à Paris, auprès du roi Louis XV). Rappelons enfin que la lignée des Ribeaupierre s'éteignit en 1673 (avec la mort du comte Jean-Jacques de Ribeaupierre / 1598 - 1673) mais leurs successeurs, les comtes palatins de Bischwiller-Birkenfeld d'abord puis les ducs des Deux-Ponts (Zwei-Brücken) gardèrent la main sur l'ancienne seigneurie jusqu'à la Révolution. En 1801, Napoléon Bonaparte nomma Maximilien 11, duc des Deux-Ponts, roi de Bavière.
2) Les Ménétriers
Essentiellement amuseurs publics, pantomimes et joueurs (ambulants) d'instruments à vent et à cordes, les Ménétriers étaient considérés durant tout le Moyen-Âge par les autorités religieuses comme les pourvoyeurs de l'enfer et devaient, de ce fait, se résoudre à vivre en marge de la société. Appréciés de la population parce qu'animant aussi bien les fêtes publiques, les fêtes de famille (baptêmes, mariages etc.) que les auberges, les musiciens professionnels qu'étaient les Méntriers - des professionnels exerçant donc leur talent dans un but lucratif - ne disposaient cependant d'aucun droit, pas plus que leurs familles.
À la fin du XIVe siècle, les autorités, pour refreiner leurs débordements, vont les organiser en confréries pieuses et leur imposer des statuts. En Alsace, le pouvoir de justice sur ces musiciens répartis sur un territoire allant de Wissembourg au Jura suisse, voire même au-delà de la rive droite du Rhin fut donné au Seigneur de Ribeaupierre dès 1390. Celui-ci prit l'habitude de déléguer son autorité à un Roi des Ménétriers ou Pfifferkenig qui lui prêtait serment et administrait les intérêts de la confrérie.
Chaque année - le 8 septembre, jour de la Nativité de la Vierge - les Ménétriers devaient se rendre à Ribeauvillé. Là, ils honoraient Notre-Dame de Dusenbach dont le pèlerinage n'est distant que d'une demie-lieue de la ville ; ils célébraient les Sires de Ribeaupierre, leurs bienfaiteurs, et achetaient leur patente annuelle sans laquelle ils ne pouvaient pas exercer leur art. De château en bourgade, les Ménétriers animaient ainsi les riches heures de l'Alsace médiévale.
Il n'est donc que justice d'évoquer leur souvenir chaque année, à la fin de l'été, à Ribeauvillé, dans le cadre d'une grande fête populaire - la fête des Ménétriers ou Pfifferdàj - où on leur rend hommage en mémoire de leurs protecteurs, les Sires de Ribeaupierre.
Si l'occasion voudrait que vous séjourniez à Ribeauvillé, ne serait-ce que temporairement, n'hésitez-pas à visiter l'un ou l'autre des trois sites décrits ci-après :
1) La Manufacture d'Impression sur Étoffes (MIE) située 19 route de Sainte-Marie-aux-Mines, créée en 1839 par l'industriel Charles-Emile STEINER en succession à Philippe STEFFAN (1756)... et devenue BEAUVILLÉ en 1980, constitue le fleuron de l'industrie textile alsacienne et son ambassa-deur connu et reconnu. BEAUVILLÉ fabrique, expose à la vente (directe) et exporte le luxe et l'art de vivre français. La teinturerie au Rouge Andrinople, matière colorante importée de Turquie via l'Angleterre, en fera une manufacture prestigieuse. L'impression à la planche, artisanale et très couteuse, a été peu à peu supplantée par l'impression au rouleau, puis au cadre main et au cadre mécanique, ces deux derniers procédés constituant aujourd'hui la plus importante activité. L'entreprise compte actuellement 150 employés.
2) L'Hôtel-de-Ville et sa collection de hanaps. Il est situé au centre de la Cité, à proximité de la Tour des Bouchers et de l'ancienne église des Augustins (Couvent). Au premier étage de ce bâtiment daté de 1773, à côté de la Salle Rouge (ainsi nommée à cause de ses tapisseries au Rouge Andrinople des Ets STEINER) se trouve le Musée de la Ville où sont conservées, dans une chambre forte vitrée, les pièces d'orfèvrerie prestigieuses offertes en remerciements par les Seigneurs de Ribeaupierre au Magistrat de la Ville vers la fin de la Guerre de Trente Ans (1639). Coulés dans un argent massif doré (vermeil) provenant des mines seigneuriales de Sainte-Marie-aux-Mines, ils sont I'œuvre de plusieurs orfevres. Un véritable trésor !
3) La Cave coopérative Martin ZAHN de Ribeauvillé - 2 route de Colmar (à l'entrée est de la ville). Depuis les temps les plus reculés, la vigne a été présente à Ribeauvillé. Les Sires de Ribeaupierre, utilement secondés par les moines bénédictins de l'ancien prieuré Saint-Morand (dont un certain Martin ZAHN) se sont chargés de mettre en valeur ce patrimoine naturel exceptionnel que constitue le sous-sol et les conditions d'exposition des parcelles au soleil, sur les contreforts vosgiens, si particuliers à Ribeauvillé. En 1895 - la crise sévissant en Alsace annexée au Reich allemand - le vignoble de Ribeauvillé a connu une douloureuse restructuration. C'est alors que quelques vignerons décidèrent de se réunir en une coopérative sur le modèle préconisé par le théoricien allemand, Frédéric RAIFFEISEN, aux idées généreuses et avant-gardistes. Rappoldsweiler Winzerverein, tel est le premier nom de cette coopérative vinicole qui sera en fait la première cave vinicole sur le territoire alsacien… et en France. Le principe de l'apport total de la récolte fut adopté à l'unanimité : en échange, les membres coopérateurs recevaient une rémunération juste et équitable. Malgré les vicissitudes de l'Histoire, particulièrement mouvementée dans ce coin de la Douce France, c'est toujours le même esprit qui règne à la Cave de Ribeauvillé. Les générations se sont suivies, les présidents se sont succédé, les millésimes aussi… mais toujours a prévalu l'esprit de solidarité qui a animé la fondation de cette cave coopérative. La cave fédère aujourd'hui 40 vignerons sur un domaine exceptionnel de 263 ha - dont les 124 ares du Clos Zahnacker (en français : le champ de ZAHN) acquis par la Cave en 1965 et dont les cépages fournissent un vin d'exception - ces 261 ha couvrant les plus beaux terroirs d'Alsace répartis sur cinq communes et sur lesquels les vignerons coopérateurs produisent 10 Gands Crus sur les 51 que compte à présent l'Alsace vinicole.
André-Xavier HEINRICH